Transitions: que faire de la mobilité dans l’architecture?

Le facteur humain
15 Mai. 2025
16 - 18h
CHF 75.00
Vincent Kaufmann,Professeur de sociologie urbaine et d'analyse des mobilités
L’ONU a identifié trois stratégies pour décarboner les mobilités, en insistant sur le fait qu’elles sont complémentaires les unes vis-à-vis des autres: l’innovation technologique et l’optimisation des systèmes de transport, le report modal de l’automobile et l’avion vers des modes de transports moins polluant et l’évitement des déplacements motorisés. Plusieurs travaux de recherches récents montrent cependant que l’immense majorité des villes et des pays dans le monde ne mise que sur l’innovation pour décarboner la mobilité et atteindre les objectifs de neutralité fixés par l’Accord de Paris sur le climat (2015) par peur d’intervenir sur les modes de vie. Or atteindre ces objectifs implique d’agir sur les trois leviers identifiés de façon conjointe. La peur d’agir sur le report modal et l’évitement des déplacements motorisés de la part des pouvoirs publics n’a sans doute pas lieu d’être dans la mesure où une partie non négligeable de la population est prête à faire le pas. Concernant les aspects sociaux de la mobilité, il est par ailleurs notable que lorsque des mesures visent à décourager l’utilisation de l’automobile sont prises, elles sont bien souvent aveugles aux inégalités sociales et provoquent un rejet des classes populaires notamment à cause de la dépendance à l’automobile souvent particulièrement forte dans ces catégories de population. Ce trait tient en particulier au fait qu’elles procèdent par l’adjonction de taxes censées être incitatives et qui concernent les véhicules plus polluant (vignettes), l’accès à certains périmètres (péages) ou le prix du stationnement. On pourrait citer de multiples exemples à travers le monde. Les gilets jaunes en France naturellement, mais également l’extension du péage urbain de Londres, le prix des transports à Santiago du Chili ou le refus par le peuple Suisse de la loi CO2 en 2022. Le risque de ces errances politiques réside ni plus ni moins dans l’abandon des politiques de neutralité carbone faute d’adhésion dans la population… Face à ces constats, il est impératif de mener une réflexion de fond sur l’espace à toutes ses échelles pour développer un aménagement des territoires permettant et invitant à adopter des modes de vie débarrassés de la dépendance à la mobilité.